La Dorine d’Amérique est une plante si discrète que nous ne la remarquons pas quand nous marchons le long d’un sentier forestier au printemps. La première fois que j’ai observé cette plante, c’était à la fin des années 70, à Lachute. Mon regard avait été attiré par une plante flottant sur un ruisseau à débit lent. Ce n’était pas un cresson d’eau ou un tapis de mousse, mais bien une plante herbacée que je n’avais jamais vue auparavant. Avec la bonne vieille Flore laurentienne de Marie-Victorin, je n’ai pas eu de difficulté à l’identifier.
Dès la fonte des neiges
Ce qui est impressionnant, c’est que la Dorine d’Amérique fleurit dès la fonte des neiges. Dans les sources et les ruisseaux peu profonds, les tiges feuillées tapissent le cours d’eau. Les feuilles sont minuscules. Elles peuvent mesurer de 4 à 20 mm, tout au plus. Elles sont de forme ronde et crénelée et sont opposées sur la tige. Les feuilles cachent les tiges qui se trouvent dans l’eau. Les racines de la plante s’enfouissent dans la vase et la maintiennent en place malgré le mouvement de l’eau.
Des fleurs étonnantes
Ce qui est de toute beauté, ce sont les fleurs qui ont un diamètre de 2 à 5 mm. Tout est infime chez cette plante. Les fleurs possèdent quatre sépales verdâtres de forme triangulaire et elles n’ont ni pédoncules ni pétales. Par contre, les huit anthères qui contiennent les grains de pollen sont bien apparentes. Ces anthères sont de couleur rouge ou orangée et sont impressionnantes à voir. Des fleurs en modèle réduit, mais qui sont d’une étonnante beauté.
Bien difficile à voir
Voici un extrait de la Flore laurentienne de Marie-Victorin : « C’est probablement la première plante à fleurir sous nos climats, mais ses fleurs sont si petites qu’elles échappent le plus souvent à l’observateur. Elle est généralement en pleine floraison au temps de la coulée des Érables. »
Observation récente
J’ai voulu parler de la Dorine d’Amérique ce mois-ci, car je l’ai aperçue récemment au parc régional du lac Jérôme. Elle était toujours aussi effacée dans son habitat naturel. Or, ses fleurs, bien que minuscules, étaient épanouies et simplement magnifiques. Chaque espèce occupe une place de choix dans son environnement naturel, une place bien à elle. Même si l’espace occupé par la Dorine d’Amérique est humble, elle sait profiter des ressources disponibles et poursuit sa croissance, sa floraison et sa reproduction. Cette plante, de la famille des Saxifragacées, mérite que l’on s’attarde à elle.