Pussywillows, cat-tails, soft winds and roses

Rain pools in the woodland, water to my knees

Shivering, quivering, the warm breath of spring

Pussywillows, cat-tails, soft winds and roses.

Gordon Lightfoot

 

J’ai toujours trouvé que les étangs bordés de quenouilles offraient une présence rassurante. Comme si ces plantes nous indiquaient, simplement parce qu’elles étaient installées là, qu’une transition s’exerçait entre la terre ferme et le milieu aquatique. Dans cet article, nous nous pencherons sur la quenouille, appelée aussi typha, une espèce facilement reconnaissable, mais pas nécessairement bien connue de tout un chacun.

 

Deux espèces au Québec

Il existe deux espèces indigènes de quenouilles au Québec. Celle que l’on observe dans les Laurentides est la plupart du temps la Quenouille à feuilles larges. Elle croît en eau douce seulement. Partout où les eaux sont peu profondes, en bordure des lacs, des étangs et le long des fossés, nous la reconnaissons à coup sûr avec ses feuilles rubanées très longues et ses fleurs en épis qui atteignent parfois trois mètres de hauteur. L’autre espèce présente au Québec est la Quenouille à feuilles étroites qui se trouve dans les marais d’eau douce et d’eau saumâtre. La Quenouille à feuilles larges ne s’y aventure pas puisqu’elle ne peut tolérer une concentration de 1 % de sel dans l’eau ambiante. À part cette différence au niveau de l’habitat, comment peut-on distinguer ces deux plantes de la famille des Typhacées ?

 

Les fleurs de plus près

Pour répondre à cette question, il faut regarder de plus près comment se présentent les fleurs de quenouilles. Les fleurs femelles sont séparées des fleurs mâles. L’épi qui contient les étamines (fleurs mâles) se situe au sommet de la plante. C’est cet épi qui contient les grains de pollen. Sous cet épi se trouvent les fleurs pistillées (fleurs femelles). Si l’épi femelle est contigu ou tout juste à côté de l’épi mâle, il y a de bonnes chances que vous soyez devant une Quenouille à feuilles larges. Si, par contre, l’épi femelle est séparé de l’épi mâle de quelques centimètres, il s’agirait alors d’une Quenouille à feuilles étroites. Les fleurs des quenouilles ne dégagent aucun parfum et ne possèdent pas de nectar. La fécondation des fleurs se fera par le déplacement du pollen situé au sommet de l’épi et qui rejoindra tout juste plus bas le pistil de la fleur femelle.

 

Comme toujours, le frère Marie-Victorin nous donne des renseignements fort utiles sur les quenouilles dans sa Flore Laurentienne. En voici un extrait : « Les quenouilles ont des particularités biologiques qui leur permettent d’assumer un rôle écologique important et défini : celui d’occuper les rivages vaseux des eaux douces et de les surélever, en utilisant les détritus organiques en suspension dans l’eau. »

 

De légers parachutes

Les rhizomes, partie souterraine des quenouilles, sont bien fixés à environ 8 à 10 cm sous la vase. Ce réseau souterrain s’implante rapidement dans un sol neuf qu’il soit inondé ou en voie de l’être. Un marais de quenouilles héberge souvent un couple de Carouges à épaulettes et même plusieurs couples en fonction de la grandeur du marais. D’autres espèces également y nichent : Bruant et Troglodyte des marais, râles et marouettes, hérons et aigrettes, etc. Les oiseaux peuvent s’y réfugier pour dormir durant leurs migrations saisonnières également. Plusieurs animaux vont se nourrir des parties souterraines de ces plantes aquatiques ou bien palustres : le rat musqué, le castor et l’orignal. Plus tard à l’automne, on remarque les fruits en aigrettes des quenouilles qui font penser à de légers parachutes. Le vent les répandra plus loin selon la direction de son souffle.

 

Une compétition féroce

Il est malheureux de constater que de plus en plus d’endroits où se trouvaient auparavant des quenouilles disparaissent au profit d’une plante exotique envahissante appelée le Roseau commun. Les roselières s’étendent dans les fossés, sur le bord des routes et des terres agricoles, là où la machinerie est à l’œuvre et a altéré le milieu. Il faut beaucoup de temps et d’énergie pour arrêter la prolifération de cette plante sur notre territoire. Des expériences concluantes ont eu lieu à plusieurs endroits au Québec. Pour protéger notre biodiversité, je pense que nous n’aurons d’autre choix que d’agir.

 

La résilience des quenouilles

Récemment, je me trouvais chez des amis. D’une fenêtre, j’avais une vue imprenable sur l’étang tout proche. Même si nous sommes en hiver, les épis des quenouilles1 pointaient au sommet. J’ai trouvé qu’il y avait une sorte de résilience de la part de ces plantes d’eau de pointer leur apex vers le ciel de janvier.

 

1 Les quenouilles sont aussi appelées massettes. En anglais, on traduit quenouille par le mot cat-tail.