Professeur de philosophie durant 36 ans, j’ai enseigné entre autres à des infirmières. J’ai été interpellé par le livre Manuel de diagnostic infirmier. Ce livre, qui décrit plus de 216 diagnostics infirmiers, a été le sujet d’un article paru dans le Sentier dans l’édition de janvier 20211. J’ai rencontré une professeure de soins infirmiers au Cégep de Saint-Jérôme qui a apprécié mon article et m’a suggéré deux livres dont un relate l’histoire des soins dans les hôpitaux du Québec. Celles qu’on nommait autrefois les « garde-malades » sont devenues des « super infirmières » indispensables, surtout en ces temps de pandémie.
1 https://www.journal-le-sentier.ca/article/manuel-de-diagnostics-infirmiers/
Extraits du livre de Yolande Cohen, Profession infirmière. Une histoire des soins dans les hôpitaux du Québec.
L’infirmière, une vocation, une psychologue sans œillère et cultivée.
Dans l’ensemble, le discours formulé par les infirmières reste dominé par la notion de vocation, laquelle renvoie une fois encore aux capacités émotionnelles des femmes. Aux qualités morales reconnues par les médecins, les infirmières ajoutent des qualités intellectuelles, physiques et sociales.
Dans cette ère de spécialisation, l’infirmière doit s’adapter au progrès et allier à son esprit d’apostolat des qualités physiques, intellectuelles, morales et sociales, en développant ses connaissances théoriques et pratiques. C’est tout cela qui constitue la compétence de l’infirmière et qui fait d’elle une amie du progrès scientifique. L’infirmière doit concilier des qualités physiques et des qualités morales : condition physique solide, système nerveux bien équilibré et, aussi, sens de la vérité, loyauté, discrétion, bonté, sympathie, patience, courage, force de caractère, sang-froid, silence, esprit de réflexion, gaité, cordialité, tolérance, pondération, obéissance, enthousiasme, initiative, observation, responsabilité, bon usage du temps, méthode, respect de la propriété, économie. Toutes ces qualités feront, bien sûr, de l’infirmière une femme accomplie.
Pour bien exercer sa profession et accomplir ses tâches techniques, l’infirmière devra enfin avoir de la résistance, une vue impeccable, une bonne ouïe, une voix calme, des paroles sobres et de la dextérité manuelle. Elle devra aussi avoir un esprit de propreté, une tenue soignée et être en mesure d’agir comme une psychologue. Des notions de techniques et de sciences viennent s’ajouter au discours qui prescrit la conduite de l’infirmière idéale. Ainsi, l’infirmière est une femme qui joue un rôle parallèle à celui de médecin, les soins infirmiers « étant une œuvre de paix qui permet d’unir au génie de l’homme le baume d’une tendresse fraternelle ». Cette culture du soin s’appuie sur le service personnel que doit rendre l’infirmière. L’infirmière doit chercher à se cultiver pour avoir une personnalité à la hauteur du prestige de son titre. Des qualités de conscience et de cœur sont exigées de la part de l’infirmière, mais, selon Germaine Bernier, les qualités d’esprit et de culture doivent l’être aussi. La culture permettra à l’infirmière de sortir de la médiocrité en accomplissant de grandes taches, car, selon Bernier, elle « enlève les œillères que la spécialisation aurait pu imposer à l’esprit ». Pour le bon soin des esprits, il faut un véritable sens psychologique