Lors de mon récent voyage au Costa Rica, je pense n’avoir jamais vu autant de papillons de ma vie! Même si certains arbres perdent leurs feuilles durant la saison sèche, plusieurs autres végétaux conservent leur feuillage, leurs fleurs et leurs fruits durant une bonne partie de l’année. L’abondance de la végétation et le climat propice à leur reproduction pourraient expliquer la présence de ces insectes 12 mois par année.
Le papillon flambeau
Le papillon qui m’a le plus impressionné fut sans aucun doute le Dryas iulia, appelé en français le flambeau. Le mâle est splendide avec ses ailes orangé sur la face antérieure. Il possède un vol rectiligne et rapide. Je l’ai observé sur une plage du golfe de Nicoya. Il batifolait d’une plante à l’autre et circulait rapidement entre deux endroits à visiter. Il n’est pas présent au Québec, mais peut être vu aux États-Unis.
Un article du Washington Post1 paru le 8 mars, parlait du déclin inquiétant des papillons sur le territoire des États-Unis. Les causes principales de leur diminution sont les suivantes :
- La construction de routes et d’édifices là où se trouvaient auparavant des prairies remplies de fleurs sauvages.
- L’augmentation de la température due aux changements climatiques qui a tôt fait d’assécher la végétation, source de nourriture des chenilles, larves de nos papillons.
- L’utilisation des pesticides de type néonicotinoïde depuis les années 1990 qui affaiblit considérablement le nombre d’insectes utiles : les pollinisateurs.
Déclin observé
Le sud-ouest des États-Unis semble être la région la plus touchée. Entre 2000 et 2020, un déclin de 22 % des espèces de papillons a été noté. Comme les oiseaux, les mammifères et d’autres animaux dépendent de ces insectes pour se nourrir, il ne faut pas passer sous silence que les insectes pollinisateurs, dont les papillons, contribuent à la fécondation des plantes, donc à la production de fruits de toutes sortes. La baisse du nombre d’insectes (bourdons, lucioles…) a aussi été observée en Europe, dans les Caraïbes et ailleurs dans le monde.
Signe encourageant?
L’écologiste américain E. O. Wilson, qui s’est penché sur le rôle des insectes dans notre monde les a surnommés : The little things that run the world.2 Un signe encourageant peut être mentionné ici. Contrairement aux ours et aux oiseaux, les insectes se reproduisent très rapidement. Si les humains prennent l’initiative de restaurer les prairies et de réduire l’usage des pesticides néonicotinoïdes, les papillons et autres pollinisateurs pourront rebondir et devenir plus nombreux en quelques générations. C’est ce que nous souhaitons ardemment.
Insecticides de type néonicotinoïde
Tout commence par les graines qui sont achetées par les agriculteurs en contactant leurs semenciers. Les graines vendues sont enrobées d’un insecticide néonicotinoïde qui protège contre les ravageurs et lorsque ces graines sont plantées, elles peuvent libérer dans l’air des particules toxiques. Dans de tels cas, certains pays ont opté pour le principe de précaution et ont aboli les néonicotinoïdes. C’est le cas de l’Union européenne, à la fin de 2018. Ces pays ont fait ce choix pour éviter l’atteinte à la biodiversité.
Produits qui n’affectent pas que les insectes
Au Canada et aux États-Unis, les néonicotinoïdes sont encore employés. Le gouvernement canadien recommande aux agriculteurs de respecter certaines normes et mentionne que la plupart des semenciers acceptent de vendre des semences qui sont traitées sans insecticide. On pensait auparavant que seuls les insectes étaient affectés par ces produits. Dès lors, nous avons trouvé que les grenouilles, les oiseaux, les poissons et d’autres invertébrés comme les vers sont aussi atteints par ces produits toxiques.
Et au Costa Rica?
La culture maraîchère est florissante au Costa Rica. Pourtant, les insecticides sont utilisés abondamment. Même si des initiatives agroécologiques et artisanales sont de plus en plus mises de l’avant, la monoculture de l’ananas semble néfaste, car on ne procède pas à la rotation des cultures. Le sol s’épuise de ses minéraux lorsque nous plantons la même espèce de plante toujours au même endroit. On doit ainsi fertiliser le sol tous les ans et utiliser des insecticides puissants pour éloigner les insectes phytophages. Et durant la saison des pluies, le trop-plein de ces produits pourra se diriger vers les eaux situées en contrebas.
Pour l’instant, les papillons sont nombreux et si variés dans ce pays. Il ne faudrait pas qu’une hécatombe se produise. Les solutions plus écologiques sont disponibles, envisageables, mais pas toujours mises de l’avant. Dossier à suivre…
- Texte de Dino Grandoni dans le Washington Post du samedi 8 mars 2025, intitulé : Butterflies in the US are disappearing at a catastrophic rate.
- The little things that run the world pourrait se traduire par le titre de mon article : Les petites créatures qui dirigent le monde.