André Comte-Sponville vulgarise les vertus dans son livre Petit traité des grandes vertus. Chacune des 18 vertus est présentée dans un court texte avec quelques références aux grands philosophes qui ont réfléchi sur le sujet. Au lieu de condamner les vices, Comte-Sponville invite à valoriser les vertus. Il souhaite « aider chacun à être son propre maitre, son unique juge. Dans quel but? Pour devenir plus humain, plus fort, plus doux ». Je vous invite à lire ce « meilleur vendeur » en France.
L’amour-passion
La première est Éros ou la vie, d’où érotisme, qui se réfère à un grand texte classique sur l’amour, Le banquet de Platon. C’est un dialogue entre plusieurs personnes, dont Socrate. Cette forme d’amour concerne la jeunesse, qui, comme on dit, tombe en amour, connait les peines d’amour. Il faut écouter les chansons populaires pour comprendre l’importance de cette vertu très émotive. Cet amour est synonyme de passion comme dans la célèbre pièce de théâtre de Shakespeare Roméo et Juliette. L’amoureux ne peut vivre sans l’autre, sa présence continuelle constitue l’essence de son bonheur. L’être aimé est unique. C’est l’aspect « animal » de la définition de l’être humain selon Aristote : « L’homme est un animal, politique ».
L’amour-action
La deuxième forme concerne les relations avec les autres. « C’est l’amour-action qui s’oppose à l’amour-passion. » L’amitié correspond à l’aspect « politique » de l’humain et est plus rationnelle. On construit, on développe, on entretient une amitié. Aristote donne des conseils à son fils Nicomaque sur l’amitié, dans L’Éthique à Nicomaque. On veut le bien de son ami, comme la mère et le père désirent le bonheur pour leur enfant. « L’amitié est condition du bonheur, refuge contre le malheur, qu’elle est à la fois utile, agréable et bonne. » Lorsque la passion diminue avec l’âge, l’amant devient le meilleur ami.
L’amour-politesse
Les deux premières formes de l’amour impliquent un contact personnel avec la personne aimée. La troisième forme va plus loin. Il faut d’abord être poli avec tous, ajouter la bienveillance avec les étrangers, la prudence, la générosité, la compassion, la gratitude, la tolérance, la douceur, la bonne foi, la miséricorde (toutes des vertus qu’explique Comte-Sponville) et la vertu chrétienne la plus importante, parce qu’elle inclut toutes les autres, la charité. C’est la fameux « Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, priez pour vos persécuteurs », paroles du Christ rapportées par Saint-Matthieu.
Concordia Salus
C’est le sens de la devise de la ville de Montréal Concordia Salus, le bonheur par la concorde. Cette dernière, selon Aristote, est une amitié sociale qui implique que l’on ne doit pas être poli qu’avec ses amis, ce qui va de soi, mais aussi avec tous ceux que nous ne connaissons pas. Tous ceux qui vivent en société doivent comprendre qu’ils sont destinés à s’entendre. À mon avis, la plus belle vertu est l’humour. Aimer, c’est avoir du plaisir à se fréquenter, rire ensemble.
Pour conclure, Comte-Sponville cite Saint-Thomas d’Aquin, qui reprend Aristote, pour qui « aimer, c’est vouloir du bien à quelqu’un ».